Coupure d’électricité à Kinshasa : à Gombe, un concert assourdissant de groupes électrogènes perturbe la quiétude des travailleurs

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Aucune coupure d’électricité – peu importe la zone – n’indigne la Société nationale d’électricité (SNEL), ces derniers temps. Ce mercredi 8 mai 2024, à 13 heures 55’, dans une bonne partie de la commune de la Gombe, un concert vrombissant des générateurs d’électricité a perturbé la tranquillité des travailleurs dans cette zone réputée administrative.

La zone qui couvre Kin Mart, Hôtel Léon, Onatra, Kin Mazière, GG Mart, l’hôpital Akram et le siège de la Direction provinciale de la Direction générale de migration (DGM) est souvent sans électricité pendant plusieurs heures et, cela, quotidiennement. Des générateurs – allumés à l’unisson jusqu’en face de l’hôtel Memling – rendent la vie invivable à cause de la pollution sonore générée par ces engins. Les coupures d’électricité sont devenues un sport national dans cette partie de la capitale, sans émouvoir les autorités de la SNEL, encore moins le ministère de tutelle. Interrogé sur cette situation qui perdure, un agent affecté au poste électrique situé non loin de l’avenue Luambo Makiadi justifie ces coupures par « l’incapacité » de leurs transformateurs à « supporter » les charges dans cette zone.
                   
En effet, cette mauvaise desserte en électricité est quasiment généralisée dans la ville de Kinshasa. Aucun quartier n’est épargné des coupures. D’autres les vivent au quotidien. A Mbudi, par exemple, un quartier qui a reçu l’implantation d’un poste électrique de 220 KV inauguré fin 2023 par le président Félix Tshisekedi, l’électricité demeure toujours un luxe. Les coupures et délestages sont un sport national dans ce quartier comme dans bien d’autres malgré la présence de ce poste électrique et ses réseaux de distribution associés.

Des quartiers, qui bénéficiaient de l’électricité presque en temps plein il y a 10 ou 20 ans en arrière, ne la reçoivent qu’en dents de scie aujourd’hui. Même si le faible taux d'électrification du pays ne fait plus du mal à personne, la RDC s’est permis de régresser davantage dans le secteur. Moins de 10% de la population congolaise aujourd’hui a un accès à l'électricité, selon le rapport sur la fracture énergétique publié, fin 2019, par le service économique de l’ambassade de France en RDC. Dans cette fourchette de 10% d’accès général à l’électricité, au total 35% concernent les zones urbaines (50% à Kinshasa) et moins de 1% dans les zones rurales. Ces chiffres ont davantage régressé en 2024.

« Un recul très remarquable », d’après Emmanuel Musuyu, secrétaire exécutif de la CORAP, une coalition des organisations de la société civile qui travaille dans le cadre du suivi des réformes et de l'action publique, dont le projet Inga. « Vous vous souvenez que le chef de l’Etat avait parlé de plus de 20% [du taux d’accès à l’électricité, NDLR], le CORAP avait réagi en démontrant qu’on était à moins de 10%. L’Autorité de régulation du secteur de l’électricité [ARE, NDLR] dans son rapport annuel de 2023 a renseigné qu’on était à 6,7%. La question est : quelle est cette magie qu’on a appliquée pour qu’on parte de 6,7% à 20 % alors que cela doit être visible ? Pour accroitre le taux d’accès, il faut produire. Combien de barrages on a construit ? On peut parler de Busanga et Zongo II, mais à quelle proportion cela a-t-il contribué au taux d’accès à l’électricité ? », s’est-il demandé dans une interview partagée notamment dans les réseaux sociaux.



Pour un pays de 2.345.409 Km2, la RDC ne possède pas un réseau de distribution d’électricité intégré à l'échelle nationale. Seul trois pôles ou réseaux régionaux, du reste peu interconnecté entre eux, tente d’exister depuis l’époque du Zaïre. Il s’agit du réseau Ouest composé des provinces de Kinshasa et du Kongo Central ; le réseau Est comprenant les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu et le réseau Sud comptant les provinces de Lualaba et du Haut-Katanga, en majorité grâce aux entreprises minières.

D’ailleurs, le pays a longtemps importé de l’électricité depuis la Zambie pour alimenter ses mines. Cela, à cause des défaillances dans le transport de l’électricité depuis le barrage d’Inga (Kongo Central). Le réseau Sud s’est servi alors d’un corridor d’alimentation pour les importations d’électricité depuis la Zambie. Mais avec le financement de la Banque mondiale, la ligne de transmission à haute tension entre Inga et Kolwezi a été réhabilitée et sa capacité doublée, passant de 500 MW à 1120 MW pour desservir les miniers du Katanga qui seront moins dépendants des importations d’électricité de la Zambie.

Dans ce marasme énergétique, la SNEL et l’Etat congolais sont toujours responsables. Puisque malgré la loi sur la libéralisation du secteur de l’électricité promulguée en 2014, la SNEL continue toujours de gérer le secteur de l’électricité à hauteur de 95% en République démocratique du Congo, en attendant des investisseurs qui trainent les pas depuis près de 10 ans maintenant.  

Dido Nsapu


08-May-2024

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